Témoin de l’actualité 

Le côté sombre de la métropole

L’histoire de Montréal, c’est aussi celle d’une métropole où le crime a parfois été roi. Celle d’un Red Light qui a longtemps fait vibrer les nuits, pour le meilleur et pour le pire. Celle d’une ville ébranlée par des tragédies sans nom. Regard sur le côté noir de la métropole.  — Jean-François Venne, collaboration spéciale

Red Light 

Lieu d’artistes, lieu d’escrocs

Des années 20 jusqu’au début des années 60, maisons de jeu, maisons de débauche, débits de boisson et cabarets se concentrent dans le Red Light montréalais. C’est aussi le lieu où se produisent les plus grands artistes de variétés d’ici et d’ailleurs, sur les scènes des Commodore, Hollywood, Cabaret Frolics, Au Faisan Doré et autres Gayety. La pègre y règne en maître, et la police se montre tolérante, parfois même complice, jusqu’à l’intervention des avocats Pacifique Plante et Jean Drapeau, puis la création en 1950 de l’enquête sur la moralité publique, présidée par le juge François Caron. Le Red Light déclinera par la suite. Il en reste quelques rares vestiges, dont le Café Cléopâtre, boulevard Saint-Laurent.

Crimes

La mafia, la fin d’une époque

La mafia montréalaise a longtemps été dominée par la famille Rizzuto. La mort du patriarche Nicolo Nick Rizzuto (ci-contre en 2006), assassiné chez lui le 10 novembre 2010 à 86 ans, symbolise la fin de cette époque et de ce clan. Son petit-fils, Nicolo Rizzuto Jr, 42 ans, avait été abattu en pleine rue à Montréal en 2009. Tandis que Vitto Rizzuto, le fils de Nick, est mort à 67 ans, des suites d’une pneumonie, en 2013.   

La guerre des motards, de 1994 à 2002

De 1994 à 2002, la guerre des motards oppose les Rock Machine aux Hells Angels. Cette lutte entre les deux clans fera plus de 160 morts, dont 9 victimes innocentes. Parmi eux, le jeune Daniel Desrochers, 11 ans, qui succombe à ses blessures après l’explosion d’un véhicule piégé devant une école primaire dans Hochelaga-Maisonneuve, le 9 août 1995. Ce drame a été le point de départ d’une action policière plus musclée contre les motards.

Les meurtres au bar Gargantua, 1975

Le 21 janvier 1975, Richard Blass, alias Le Chat, entre au bar Gargantua et abat le gérant, un ancien policier. Il fait ensuite descendre d’autres clients au sous-sol, avant d’y mettre le feu. Au total, 13 personnes périssent. Ce crime odieux, perpétré par le criminel évadé du pénitencier Saint-Vincent-de-Paul trois mois plus tôt, déclenche une vaste chasse à l’homme. Le 24 janvier 1975, il est abattu de 27 balles par la police à Val-David. La cavale de Richard Blass après son évasion a inspiré le film Requiem pour un beau sans-cœur, de Robert Morin.

Le vol du viaduc Hochelaga, 1924

« Jamais drame ne s’est répandu plus rapidement en ville et a créé une telle sensation », écrit La Presse du 2 avril 1924, au sujet d’un spectaculaire vol perpétré la veille contre un véhicule de la Banque d’Hochelaga. Les neuf bandits avaient manœuvré pour piéger le véhicule sous le viaduc de la rue Ontario, avant de le prendre d’assaut. Ils dérobent alors plus de 140 000 $ (l’équivalent de 2 millions en dollars d’aujourd’hui), et tuent un employé. Les assaillants seront vite rattrapés et quatre d’entre eux, dont un ancien policier, seront pendus le 24 octobre 1924, ce qui constituera la première quadruple pendaison au Canada.

Faits divers 

Le Blue Bird en flammes, 1972

La tragédie du Blue Bird fait la une de La Presse du 2 septembre 1972. L’incendie de ce populaire cabaret-restaurant de la rue Union, au-dessus duquel se trouvait le bar country Wagon Wheel, a tellement marqué Montréal qu’une commémoration en l’honneur des 37 victimes a été tenue 40 ans plus tard. Trois hommes, James O’Brien, Jean-Marc Boutin et Gilles Eccles, ont été condamnés à la prison pour avoir lancé des cocktails Molotov sur l’établissement. Ils soutenaient avoir voulu effrayer le portier, avec lequel ils avaient eu une altercation plus tôt dans la soirée… 

La catastrophe aérienne de Griffintown, 1944

Le 25 avril 1944 à 10 h 26, un bombardier Consolidated B-24 Liberator s’écrase sur la partie sud du centre-ville de Montréal, accident qui ravagera une partie de Griffintown. Malgré l’ampleur de la catastrophe, on ne déplorera que 15 morts, y compris les 5 membres d’équipage. Le carburant contenu dans les réservoirs de l’appareil créera un incendie monstre que les pompiers mettront des heures à maîtriser. L’avion avait décollé de Dorval quelques minutes plus tôt, à destination de l’Europe, lorsque le pilote constate un problème technique. Il réussit à éviter les gratte-ciel du square Dorchester et se dirige vers le fleuve pour y tenter un amerissage d’urgence, qui échoue. 

Un théâtre devenu tombeau, 1927

« L’on entend jusque dans la nuit des sanglots à fendre l’âme. » La Presse du 10 janvier 1927 relate l’incendie qui a ravagé la veille le théâtre Laurier-Palace, rue Sainte-Catherine Est, tuant 77 personnes, en majorité des enfants venus y voir des films muets. Tous les théâtres et cinémas de la ville seront par la suite inspectés, et les moins sécuritaires seront fermés. Le clergé saisit la balle au bond pour faire campagne contre des films jugés immoraux et condamner l’ouverture des théâtres le dimanche et leur accès aux mineurs. À partir de 1928, les théâtres du Québec furent interdits pendant 40 ans aux moins de 16 ans.

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