Mali

QUATRE ANS D’INSTABILITÉ

2011 

Des dizaines de Touaregs formant la garde d’élite du colonel Kadhafi, en Libye, désertent avec de l’équipement militaire volés. Plusieurs trouvent refuge au nord du Mali et finissent par grossir les rangs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). D’autres, moins nombreux, iront rejoindre les rangs d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).

Janvier 2012 

Les Touaregs du nord du Mali se soulèvent contre le gouvernement malien. Des combats éclatent entre les soldats du MNLA et l’armée malienne. Le pays est vite divisé en deux.

Mars 2012 

Un coup d’État militaire chasse le président Amadou Toumani Touré du pouvoir. Sa réaction au soulèvement touareg est perçue comme trop molle.

Avril 2012 

Le MNLA, un groupe laïque, déclare l’indépendance de l’Azawad, un grand territoire du nord du pays. Quelques jours plus tard, il se fait chasser par des groupes islamistes, qui font flotter le drapeau noir du djihad sur Tombouctou.

Janvier 2013

La France déclenche l’opération Serval. Environ 3000 soldats français sont envoyés en soutien à l’armée malienne. Mission : repousser les djihadistes, qui menacent de prendre le sud du Mali. La mission est une réussite militaire : Gao, Tombouctou et Kidal, les principales villes du nord, sont vite reprises.

Août 2013 

Élection d’un nouveau président, Ibrahim Boubacar Keïta. Il obtient 77,6 % des voix. À peu près au même moment, Al-Mourabitoune, un groupe djihadiste salafiste lié à Al-Qaïda, naît de la fusion de deux groupes actifs au Mali et dans le Sahel. Il commettra plusieurs attentats dans les mois suivants.

— Tristan Péloquin, La Presse, avec Le Figaro et Le Monde

Attentat à Bamako

Une réponse d’Al-Qaïda au groupe État islamique

La prise d’otages à l’hôtel Radisson Blu de Bamako, hier, a été revendiquée conjointement par deux groupes, soit l’Émirat du Sahara, un groupe affilié à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), et Al-Mourabitoune. Qui sont ces groupes ?

CE QUE L’ON SAIT DE CES DEUX ORGANISATIONS 

Les deux groupes terroristes sont dirigés respectivement par deux djihadistes algériens : Yahia Abou El Houmam, de son vrai nom Djamel Okacha, et Mokhtar Belmokhtar, connu aussi sous le nom de Khaled Abou al-Abbas.

Au Canada, on a entendu parler de Al-Mourabitoune lors des attaques du 16 janvier 2013 contre les installations gazières de In Amenas (ou Tiguentourine). La GRC avait alors révélé qu’il y avait quatre individus d’origine canadienne parmi les terroristes responsables des attaques qui avaient fait 66 morts (37 otages et 29 terroristes).

« Al-Mourabitoune est un groupe salafiste créé en août 2013, note Bruno Charbonneau, professeur au département de science politique de l’Université Laurentienne. Il est le résultat de la fusion de deux mouvements : “Les Signataires par le sang”, que dirigeait Mokhtar Belmokhtar, ainsi qu’une partie du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO). »

« En mars dernier, poursuit M. Charbonneau qui dirige aussi l’Observatoire sur les missions de paix et opérations humanitaires de la chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM, Al-Mourabitoune a revendiqué l’attaque d’un restaurant de Bamako très fréquenté par des Européens et qui a fait cinq morts. On peut dire que le groupe est responsable de la reprise des violences dans la région depuis quelques années. »

QUI EST MOKHTAR BELMOKHTAR ?

« C’est le personnage central des événements qui se déroulent dans le Sahel depuis 2003. Né en Algérie, il a passé du temps en Afghanistan avant de revenir dans son pays d’origine pour participer à la guerre civile. Il a été le premier chef de l’AQMI en 2007.

« Pour financer ses activités, Belmokhtar se livre au trafic de cigarettes et fort probablement de drogue, de voitures et de migrants », note Cédric Jourde, professeur à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Les services secrets l’auraient d’ailleurs baptisé M. Malboro. Notons que Belmokhtar avait été déclaré mort par la Libye en juin dernier, information qui a été démentie depuis par plusieurs observateurs de la région.

Y A-T-IL UN LIEN À FAIRE ENTRE LA PRISE D’OTAGES DE BAMAKO ET LES ATTENTATS DE PARIS ?

« On peut penser que la prise d’otages est le fruit d’une rivalité entre Al-Qaïda et le groupe État islamique, dit Cédric Jourde. Al-Qaïda et ses affiliés, s’ils sont réellement à l’origine de la prise d’otage, veulent montrer qu’ils sont non seulement opérationnels mais qu’ils sont l’organisation phare dans la région. »

« Depuis les attentats de Paris, toute l’attention est tournée vers le groupe État islamique, renchérit Bruno Charbonneau. Ce serait tout à fait dans la logique des choses que les groupes affiliés à Al-Qaïda aient voulu attirer l’attention sur eux. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.