des problèmes, des solutions

TORONTO — En saison, Claude Julien fait généralement preuve de patience avec ses trios, leur donne le temps qu’il faut pour trouver leurs aises. Mais dans une courte série qui est maintenant devenue essentiellement un 2 de 3, l’entraîneur-chef du Canadien n’a pas le loisir d’être patient.

Des changements s’imposent à l’avant. Julien s’est plaint d’avoir trop de « passagers » après la défaite de lundi. Mardi, il a donné congé d’entraînement à la plupart de ses joueurs, mais en visioconférence, il a prévenu les journalistes.

« Regarde le match hier, on a vu [Nick] Suzuki avec d’autres ailiers. [Phillip] Danault aussi. J’ai fait des changements pendant le match. On doit être prêt pour des changements. »

— Claude Julien

Pourquoi un tel besoin de changement ? Commençons par cerner quelques problèmes.

Le trio Drouin-Suzuki-Armia

Julien n’a nommé aucun « passager » par son nom. Peut-on se permettre de croire que Joel Armia et Jonathan Drouin en font partie ? Même si leur centre Nick Suzuki s’est montré prêt à jouer, Armia et Drouin n’ont rien généré de bien bon. Après deux matchs, ce trio, que Julien avait souvent vanté le mois dernier au camp, a produit un but et a été sur la patinoire pour un but de l’adversaire à 5 contre 5. Par contre, son ratio de possession de rondelle est atroce ; le Canadien ne génère que 34 % des tentatives de tir (indice Corsi) quand les trois sont sur la patinoire à 5 contre 5. Pendant la saison, les trois attaquants ont passé 42 minutes ensemble à 5 contre 5, selon Natural Stat Trick. Résultat des courses : 0 but marqué, 5 buts accordés. Les preuves s’accumulent.

Max Domi

Cette séquence, qui s’est déroulée lors du match préparatoire du Tricolore, illustre à merveille la situation dans laquelle Max Domi est coincé.

Le problème n’est pas tant Domi lui-même, qui a connu des séquences intéressantes, que son utilisation. À voir un joueur de son talent au sein du quatrième trio, on pourrait croire que le Canadien présente une véritable machine offensive. Or, ce n’est pas exactement le cas. Après deux matchs, Domi joue en moyenne 15 minutes, lui qui en jouait 17 en saison. Sa moyenne des deux matchs serait encore plus basse si le premier duel n’avait pas été en prolongation… Pourtant Domi se comporte comme un gars qui comprend l’enjeu du moment. Les rares fois où il a croisé Sidney Crosby, il s’est assuré de le déranger. Bref, il mérite des compagnons de trio qui pourront compléter ses manœuvres.

Le trio Tatar-Danault-Gallagher

Depuis deux ans, ce trio est une valeur sûre pour Julien. Encore cette saison, les chiffres des trois complices à 5 contre 5 étaient renversants : 36 buts marqués, 26 buts accordés, 62 % des tentatives de tirs contrôlées, et 63 % des chances de marquer. Quand Julien disait, mardi matin, que le Tricolore était « une équipe de 5 contre 5 », c’est beaucoup grâce à ces trois-là. Or, d’une part, le jeu s’est déroulé à 5 contre 5 pendant 103 des 134 minutes jusqu’ici. C’est donc le quart de la série qui ne s’est pas joué dans ces conditions. D’autre part, l’état de santé de Brendan Gallagher suscite des inquiétudes. Lundi, le petit ailier droit a dû rentrer au vestiaire quelques minutes en troisième période. S’il n’est pas à 100 %, il ne peut pas déployer sa fougue habituelle.

La solution

Premièrement, une plus grande discipline règlerait une partie des problèmes. C’est l’évidence même.

« Même s’ils ont marqué un seul but en avantage numérique, ils ont obtenu du momentum et c’est ce que tu dois faire si tu ne marques pas. On doit se tenir loin du banc des pénalités, on doit jouer davantage à 5 contre 5. »

— Claude Julien

Ensuite, un léger réaménagement des trios s’impose, avec à la clé un changement dans le personnel.

Allons-y avec la formule suivante.

Tatar-Danault-Gallagher

Domi-Suzuki-Drouin

Lehkonen-Kotkaniemi-Byron

Weal-Evans-Armia

Deux trios inchangés

Après deux ans de travail colossal, le trio de Danault mérite le bénéfice du doute. De toute façon, les présences de Domi au centre de cette unité n’ont rien donné de transcendant. Qui sait si Julien ne trouvera pas quelques confrontations qui sauront mettre en valeur ce trio. Jesperi Kotkaniemi a trouvé le moyen d’être productif ; pourquoi ne pas laisser cette unité intacte ? La recette est bien équilibrée, avec deux ailiers responsables pour encadrer un jeune qui a ses carences. L’échantillon est mince, mais ce trio-là affiche les meilleurs indicateurs de possession de rondelle du Canadien cette semaine.

Armia sacrifié

Entre Armia et Drouin, c’est donc Armia que l’on sacrifie et que l’on envoie au sein du quatrième trio. D’abord, l’équipe ne doit rien au gros ailier droit. Ensuite, comme il est employé en avantage et en désavantage numérique, il est assuré d’avoir une utilisation correcte qui lui permettra de retrouver ses marques. Quant à Drouin, il a le potentiel – plus qu’Armia – de réellement changer la donne. Un joueur purement offensif comme lui doit le faire avec des coéquipiers capables de générer de l’attaque. « Mon travail, dans cette équipe, c’est de créer de l’attaque, a affirmé Drouin. Être responsable défensivement aussi, mais moi, personnellement, je dois créer de l’attaque, aller chercher des buts, des passes. [Lundi], on n’a pas eu de but pendant 58 minutes. Si on joue bien défensivement, on va avoir nos chances offensivement. »

Et Evans ?

Enfin, pourquoi ne pas ouvrir la porte au centre Jake Evans ? En étant à domicile lors des deux prochains matchs, Julien aura la chance de protéger sa recrue, d’éviter de l’envoyer, par exemple, en zone défensive contre Crosby et Jake Guentzel. De plus, Evans peut jouer en désavantage numérique, et il l’a d’ailleurs fait en fin de saison quand il a été rappelé. En ce sens, il serait plus utile que Dale Weise, qui joue exclusivement à 5 contre 5. Au nombre de punitions décernées par les officiels depuis le début des séries, il est très difficile pour un entraîneur de justifier la présence d’un joueur qui n’est pas employé au sein des unités spéciales.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.