Éducation

Et si on s’attaquait à la cause

Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a dévoilé récemment ses sept priorités en éducation. Ces intentions ont été bien accueillies dans leur ensemble. En tant que professionnels de l’éducation, nous croyons que notre système d’éducation a surtout besoin de solutions qui font preuve de profondeur, d’envergure et de créativité.

En effet, les solutions proposées à des enjeux de réussite et de motivation scolaires sont souvent des remèdes de surface. On s’intéresse au pourtour de l’école (les services, les programmes d’intérêt et les ressources) alors que l’on devrait se questionner et s’intéresser au cœur de l’école, soit la pédagogie, l’apprentissage, l’enseignement et l’évaluation. Nos jeunes passent leurs journées en classe, pourquoi ne pas s’intéresser davantage à ce qui s’y vit ?

La plupart des gestionnaires d’école croient qu’ils n’ont pas le luxe de s’intéresser à la pédagogie, car ils ont trop de problèmes d’apprentissage, de comportements et de motivation à gérer. Et si justement, s’attarder à la pédagogie, de façon rigoureuse et profonde, était en fait la solution ?

Ils font mieux que le Québec

Il existe des exemples de systèmes scolaires qui performent mieux que le Québec en matière de réussite scolaire et de diplomation, car ils encadrent davantage l’enseignement et l’évaluation. Ils s’appuient sur une vision commune claire, recueillent des données pertinentes et soutiennent mieux leurs enseignants. Nul besoin d’aller à l’autre bout du monde. Notre voisin, l’Ontario, fait bien mieux que nous. Depuis déjà plusieurs années, l’Ontario s’est attaqué au développement de la littératie, à l’évaluation des apprentissages, au développement des compétences globales et au développement professionnel des enseignants en s’appuyant sur des pratiques probantes.

Contrairement à ce que plusieurs croient, le système d’éducation québécois n’est pas mauvais. Nos programmes de formation figurent parmi les meilleurs au monde. Mais sont-ils bien compris, intégrés et enseignés dans nos écoles ?

Sommes-nous suffisamment ambitieux dans l’encadrement des pratiques en enseignement et en évaluation ? Les écoles déploient une énergie considérable à offrir des programmes particuliers et des activités parascolaires engageantes, ce qui est fortement souhaitable. Toutefois, plusieurs de nos jeunes s’ennuient dans leurs cours de mathématique, de français et de sciences, et bien des garçons fuient l’école à toutes jambes. Ce n’est pas qu’ils ne veulent pas apprendre, réussir ou faire des efforts ; c’est qu’ils n’y trouvent pas de sens, qu’ils n’y vivent pas suffisamment de réussites. Alors, au-delà des programmes particuliers, comment les motiver à suivre des cours qu’ils jugent inutiles ou peu stimulants ?

Plus globalement encore, réfléchissons à ce que nous voulons que l’école enseigne. Dans un monde qui se complexifie, les savoirs demeurent importants, mais ne négligeons pas d’autres compétences tout aussi fondamentales comme le savoir-faire et le savoir-être (pensée critique, citoyenneté, collaboration, etc.).

Bienvenue en 2023

Il est aussi temps de faire passer le métier d’enseignant au siècle présent. Valoriser la profession enseignante, ce n’est pas qu’une question de salaire et de conditions de travail. Il faut aussi donner aux enseignants les moyens de bien faire leur travail, en les soutenant et en leur fournissant un accompagnement.

Pensons, par exemple, à intégrer le développement professionnel à la tâche des enseignants, à mesurer l’impact de leurs pratiques sur la réussite de leurs élèves, à offrir des cadres de travail plus collaboratifs où chacun peut miser sur ses forces et à allouer plus de temps à la planification de l’enseignement.

Enfin, il faut se le dire : l’organisation scolaire proposée par notre système appartient à un autre temps. Particulièrement au secondaire, les horaires fixes, l’enseignement (et l’apprentissage) en silo, le one-size-fits-all et toute la rigidité associée appartiennent à un autre siècle. Il est temps de réfléchir à une expérience scolaire où le temps et l’espace répondent à des besoins pédagogiques et non l’inverse.

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