Élections fédérales 2015
Le numérique, nouvelle machine de guerre
La Presse
Le Parti libéral utilise
, une version modifiée du logiciel créé par la société NGP VAN dont s’est servie l’équipe de Barack Obama en 2012. Il permet de créer une vaste banque de données d’électeurs, de sympathisants et de bénévoles. D’un seul clic, le logiciel peut contacter directement les électeurs par téléphone, par courriel ou par la poste. Une extension permet même de joindre des sympathisants directement sur Facebook, pour ensuite entrer en contact avec leurs amis indécis, plus susceptibles d’être influencés par un proche. Les libéraux affirment cependant ne pas se servir de cette extension.C’est un généticien de l’Université McGill, Sean Wiltshire, qui est le grand responsable de l’analyse de ces données chez les libéraux. « Les données qu’on récolte en génétique sont très semblables à celles qu’on utilise en politique : elles sont très désordonnées », explique-t-il.
Le logiciel du Parti libéral permet par exemple de connaître précisément le nombre de bénévoles inscrits dans chaque circonscription, à quand remonte la dernière activité politique qu’ils ont organisée et leur budget de campagne. Le système informatique connaît aussi, grâce aux renseignements provenant du recensement national qu’il a ingurgités, la proportion de familles monoparentales dans une circonscription, le salaire moyen de ses électeurs ou la langue utilisée par les communautés culturelles représentées. Le parti peut ainsi, par exemple, cibler une circonscription précise pour envoyer une tête d’affiche faire une annonce sur un thème donné.
Chez les libéraux, si un bénévole offre ses services sur le site web du parti, le système informatique central donne 48 heures aux responsables de la circonscription pour entrer en contact avec lui. Si le bénévole n’est pas contacté, un message électronique est envoyé directement au directeur de campagne. Le but est de remettre le bénévole au centre de l’organisation du parti, une idée chère au chef Justin Trudeau. « Après la perte du gouvernement, il y a eu une prise de conscience. On a réalisé qu’on était déconnectés de notre base militante », explique le porte-parole Olivier Duchesneau.
Même s’il utilise un logiciel américain pour recruter des sympathisants sur les réseaux sociaux, le Bloc québécois préfère se fier au logiciel
, créé au Québec, pour coordonner sa « sortie de vote ». Ce logiciel, accessible à tous les partis, a été utilisé par l’équipe de Denis Coderre pour faire mousser le vote lors des élections municipales. Il permet à n’importe quel bénévole de faire des appels téléphoniques à partir de chez lui plutôt que d’un local électoral. « Tout ce qu’il faut, c’est un ordinateur branché sur l’internet. La grande force de ce système, c’est de permettre à un bénévole qui se trouverait à Montréal de faire des appels pour un candidat qui veut se faire élire à Manicouagan. Ça dématérialise complètement le travail et ça élimine la nécessité d’avoir un local électoral », explique Frédéric Lapointe, président de la Ligue d’action civique, qui a participé au développement du logiciel.Les conservateurs ont été les premiers au Canada à utiliser l’informatique de façon aussi poussée en campagne électorale. Leur logiciel, appelé
( ), récolte une foule de renseignements sur les électeurs – qui a fait un don au parti, qui a déjà installé une pancarte conservatrice sur son terrain, qui a déjà participé à un rassemblement politique du parti… Mais l’interface de cette base de données est vieillissante. En 2013, le parti a voulu la changer pour un logiciel plus moderne appelé , mais la transition a été un fiasco. Le parti a englouti entre 7 et 9 millions dans l’aventure, avant de revenir à . Pour ces élections, une version mobile de , appelée C2G ( ), a été conçue.La plateforme des néo-démocrates porte le nom de
. Elle a été élaborée par une société d’Ottawa, NetFore Systems, qui met son logiciel à la disposition d’organismes à but non lucratif. Parallèlement, le parti s’est adjoint les services de Blue State Digital, une entreprise d’analyse de données numériques de Chicago, qui a entre autres mis au point la stratégie en ligne de la première campagne présidentielle de Barack Obama, en 2008.