Grippe aviaire

La contamination d’oiseaux sauvages reprend

La contamination d’oiseaux sauvages à la grippe aviaire se poursuit au Québec, mais à un rythme moins rapide qu’au printemps.

La H5N1 a été détectée chez environ 200 oiseaux de la faune entre avril et la fin de juillet, au Québec. Après n’avoir recensé aucun cas au mois d’août, les autopsies menées sur des oiseaux retrouvés morts dans la nature ont permis de révéler 15 nouveaux cas de grippe aviaire en septembre.

« On a eu une accalmie au mois d’août, mais avec le retour des oies blanches et des bernaches cet automne, on recommence à avoir des cas », explique Stéphane Lair, directeur du Centre québécois sur la santé des animaux sauvages.

Cet automne, la grippe aviaire a été détectée chez des bernaches du Canada et des oies des neiges, mais aussi chez un canard pilet, un canard noir, deux sarcelles d’été et un goéland à bec cerclé. Ce sont des citoyens qui ont signalé la présence d’oiseaux morts au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. Les cas positifs ont été recensés à Lachute, Sainte-Anne-de-Sorel, Venise-en-Québec, Cap-Tourmente et Saint-Jean-sur-Richelieu.

« Ce sont pas mal les mêmes endroits qu’au printemps dernier. Ce sont des lieux où il y a des haltes migratoires et où on retrouve une forte densité d’oies des neiges ou de bernaches en même temps. Pour le moment, on n’a pas eu de cas à Baie-du-Febvre comme au printemps, mais ça devrait arriver. »

– Stéphane Lair, directeur du Centre québécois sur la santé des animaux sauvages

La maladie se propage le plus souvent parmi les oiseaux qui vivent en colonie. M. Lair fait d’ailleurs référence aux centaines d’eiders à duvet qui ont été retrouvés morts dans le Bas-Saint-Laurent, au printemps dernier, et aux carcasses de fous de Bassan qui ont jonché les plages de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

Des oiseaux « nécrophages » contractent aussi la maladie. C’est le cas de goélands, de pygargues à tête blanche et d’urubus à tête rouge, qui sont des espèces vivant au Québec à longueur d’année. « S’ils mangent une carcasse ou qu’ils attrapent un oiseau malade, c’est comme ça qu’ils s’infectent. C’est la même chose pour les corneilles et les corbeaux qui sont nécrophages », explique M. Lair.

« Préoccupant »

Le vétérinaire Jean-Pierre Vaillancourt affirme que les excrétions des oiseaux infectés – comme leurs excréments et leurs sécrétions nasales – contaminent aussi l’environnement. Le virus vit peu longtemps sur les surfaces sèches ; il préfère les endroits humides et les températures fraîches comme le bord des cours d’eau, là où se tiennent de nombreux oiseaux, souligne le professeur de l’Université de Montréal.

« C’est préoccupant parce que la contamination environnementale, c’est ce qui peut mener à la contamination d’oiseaux domestiques [d’élevage] », explique le professeur Vaillancourt.

« Pour les oiseaux d’élevage, la contamination va le plus souvent se faire à cause de l’équipement, des bottes ou des mains d’une personne. Le virus va être amené de cette manière à l’intérieur d’un bâtiment où sont gardés des oiseaux domestiques », ajoute-t-il.

Les poules, les dindes, les canards ou n’importe quels autres oiseaux de ferme tombent malades en picorant le sol infecté.

Le vétérinaire affirme que les chercheurs se penchent actuellement sur la transmission de la grippe aviaire par aérosol. Aussi, des études sont menées sur les mouches et les ténébrions. Au Japon, des chercheurs ont collecté des mouches dans un périmètre de 3 km autour d’une ferme infectée. Le tiers des insectes avait des particules de virus sur leur corps, note M. Vaillancourt.

Au Canada, 967 oiseaux ou mammifères sauvages ont été déclarés positifs à la H5N1, selon un tableau interactif chapeauté par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), depuis novembre 2021. « Il s’agit d’un sérieux rappel pour quiconque élève des oiseaux de rester vigilant face à l’influenza aviaire hautement pathogène et de s’assurer qu’il a mis en place des mesures de biosécurité efficaces », écrit l’ACIA dans un courriel envoyé à La Presse.

Notons que le premier cas de grippe aviaire au Québec a été répertorié en avril 2022.

Un petit échantillon

Matthieu Beaumont, biologiste de la faune à Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), explique toutefois que les statistiques sur la grippe aviaire chez les oiseaux sauvages ne représentent qu’un petit échantillon. Les carcasses d’oiseaux ne sont pas toutes ramassées. Des autopsies sont réalisées uniquement sur certains spécimens après le signalement d’un citoyen, rappelle-t-il.

« C’est très utile pour suivre la maladie, mais ce n’est pas une méthode qui permet de mesurer l’impact sur les populations. C’est fait pour savoir quand la maladie arrive dans un secteur donné chez une espèce donnée », affirme le coordonnateur aux interventions d’urgence à ECCC.

Le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec confirme pour sa part que l’influenza aviaire s’est répandue dans l’ensemble des régions du Québec. « Il demeure possible que d’autres évènements de mortalité d’intensité variable chez les oiseaux sauvages continuent d’être détectés de façon sporadique dans les prochains mois », a écrit le Ministère dans un courriel.


EN SAVOIR PLUS

1446
Nombre de cas positifs – suspects et confirmés – d’influenza aviaire hautement pathogène chez des mammifères et des oiseaux sauvages à travers le Canada, depuis novembre 2021.

Source: source : Agence canadienne d’inspection des aliments

247
Nombre de cas positifs – suspects et confirmés – d’influenza aviaire hautement pathogène chez des mammifères et des oiseaux sauvages au Québec, depuis avril 2022. Ce nombre représente 17,08 % des cas recensés à travers le pays.

Source: source : Agence canadienne d’inspection des aliments

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