Agroalimentaire

En marche vers l’autonomie alimentaire

Le premier ministre du Québec l’a répété à plusieurs reprises depuis le début de la pandémie : il souhaite que la province avance vers une plus grande autonomie alimentaire. Parallèlement, les Québécois ont un grand appétit pour les aliments locaux. Pour arriver à de réels progrès, il faut agir sur plusieurs fronts. Survol.

L’aquaponie combine l’aquaculture et l’hydroponie. Concrètement, on élève des poissons dans des bassins, on récupère leurs rejets dans un système de minéralisation que des bactéries convertissent en nutriments et on utilise ces nutriments pour cultiver des plantes en hydroponie. Ce concept de ferme verticale dans un environnement contrôlé est peaufiné depuis plusieurs années déjà au Québec par ÉAU (Écosystèmes alimentaires urbains), qui accompagne des clients pour développer ce type de production.

Cette entreprise vient de bâtir dans le Mile-Ex à Montréal, grâce à l’appui du Programme innovation administré par Investissement Québec, le laboratoire LabÉAU pour faire de la recherche et développement afin d’optimiser les procédés d’aquaponie.

« L’un des grands objectifs est de réduire l’empreinte environnementale de l’agriculture, notamment parce que nous utilisons la même eau pour les deux productions à haut rendement en raison de leur verticalité et de l’environnement contrôlé », explique Julien Le Net, cofondateur et directeur du développement des affaires chez ÉAU.

« Nous n’utilisons pas de pesticides ni d’insecticides, mais nous favorisons des techniques comme la lutte biologique intégrée qui utilise le vivant pour combattre les ravageurs, le plus possible comme cela se fait dans la nature », ajoute Benjamin Laramée, cofondateur et directeur scientifique chez ÉAU.

Alors que de grands projets d’aquaponie sont déjà en activité depuis des années ailleurs dans le monde, notamment aux États-Unis avec Superior Fresh, les premières fermes d’aquaponie québécoises devraient voir le jour à Montréal à partir de l’été.

« Nous avons besoin de petits et de grands projets pour augmenter les quantités produites et diversifier la production au-delà des tomates, des laitues, des fines herbes, des concombres, des fraises et des poivrons », affirme André Michaud, président d’Agro Québec, qui accompagne les organisations du milieu agroalimentaire dans leur positionnement stratégique et leurs efforts de commercialisation.

Pour y arriver, il évalue qu’il faut que le gouvernement stimule la recherche, donc cela prend des établissements d’enseignement forts, en plus d’une réglementation adéquate et des entreprises qui prennent le risque de se lancer.

« Pour les inciter à le faire, il faut des subventions pour partager le risque avec le reste de la société, affirme-t-il. Le gouvernement l’a fait avec les serres et c’est très bien. »

Le gouvernement du Québec investit effectivement énormément dans les serres depuis quelques années : l’objectif est de doubler le volume de culture en cinq ans.

Des technologies et des gens pour les utiliser

Le développement des technologies et leur adoption sont essentiels pour avoir les moyens de nos ambitions en matière d’autonomie alimentaire.

« Il faut automatiser et robotiser beaucoup d’opérations dans la production et la transformation. Il y a eu beaucoup d’avancées ces dernières années. Il faut les adopter et avoir des gens formés pour les utiliser. »

– André Michaud, président d’Agro Québec

En plus de programmes crédités axés sur la pratique dans les métiers qui couvrent les opérations de la ferme à la table, l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec (ITAQ) offre de la formation continue, notamment dans le cadre du Plan d’agriculture durable.

« Les machines agricoles sont maintenant équipées de capteurs qui prennent des données qu’on peut coupler par exemple avec les données météo pour identifier avec précision les besoins en eau, en fertilisants, en insecticides, etc., affirme Aisha Issa, directrice générale de l’ITAQ. Lorsqu’on utilise les données, on connaît bien nos besoins réels et on peut s’ajuster en conséquence. »

S’il est important de former nos jeunes, André Michaud souligne toutefois qu’on a un manque urgent de main-d’œuvre en transformation alimentaire. « On a besoin de bouchers, de boulangers, de charcutiers, etc. Il y a énormément de gens formés dans le monde qui rêvent de venir ici, alors on appelle à un processus accéléré pour les accepter. »

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