Viviane Lalande, Mathieu Nadeau-Vallée et les sœurs Genesse

Utiliser les réseaux sociaux pour faire le bien

Malgré tout ce qu’on dit de mal au sujet des réseaux sociaux, certains s’en servent pour faire le bien. Mathieu Nadeau-Vallée déboulonne les fausses nouvelles sur la COVID-19, les sœurs Genesse – Marie-Emmanuelle et Florence-Olivia – ont popularisé un signe de main qui a sauvé la vie de femmes et Viviane Lalande diffuse des vidéos de vulgarisation scientifique qui ont un succès monstre. C’est ce qui leur a permis de se tailler une place dans notre palmarès.

Porter du blanc en été ? Les animaux sont-ils droitiers ? À quoi servent les motifs du papier de toilette ? Depuis 2013, Viviane Lalande répond à toutes sortes de questions ludiques avec une approche rigoureuse et scientifique. Elle publie les réponses sur sa chaîne Scilabus, sur YouTube.

« Quand je fais des chroniques à la télévision, je n’obtiens pas de retours. Avec les vidéos sur YouTube, je reçois des centaines de commentaires qui me permettent de m’améliorer », explique l’ingénieure mécanique.

Scilabus est suivi par 450 000 abonnés. Ce serait la chaîne francophone de vulgarisation scientifique tenue par une femme ayant la plus grande audience sur YouTube. Viviane Lalande diffuse aussi du contenu sur Twitter et sur Instagram.

« Sur Instagram, il y a une relation qui s’instaure avec et entre les abonnés et je trouve ça très agréable », dit celle qui a quitté la France pour le Québec il y a 13 ans.

Le médecin résident Mathieu Nadeau-Vallée publie aussi du contenu humoristique sur TikTok depuis quelques années. Quand la pandémie est arrivée au Québec, il est toutefois tombé sur des vidéos contenant de fausses informations au sujet de la COVID-19.

« Je me suis alors dit que j’allais faire une vidéo [pour rectifier les faits] et qu’après, le problème serait réglé. Mais je me suis mis un doigt dans l’œil et, un an plus tard, je suis encore là à produire d’autres vidéos », lance le résident en anesthésie qui est suivi par 83 000 personnes sur TikTok et 28 000 sur Twitter.

Avec le temps, il n’a pas perdu son ton comique. Il emploie l’humour parce que plus ses vidéos sont regardées longuement sur TikTok, plus l’algorithme les partage avec un large public, dit-il.

« Pour moi, c’est important que les gens regardent les vidéos jusqu’à la fin, mais c’est difficile. La plupart des gens ne sont pas des complotistes et ils se disent qu’ils n’ont pas besoin de regarder mon contenu. J’inclus donc de l’humour, comme ça, ils regardent jusqu’à la fin et ils trouvent ça drôle », explique celui qui s’attaque aux fausses informations directement où elles se propagent.

Marie-Emmanuelle et Florence-Olivia Genesse ont quant à elle profité de la pandémie et de leur confinement, ensemble à la maison familiale de Magog, pour lancer leur compte The Sis sur TikTok. À l’époque, le réseau social était surtout utilisé pour diffuser des chorégraphies. « On aime danser, mais on s’est demandé ce qu’on pourrait apporter comme valeur ajoutée. On a des choses à dire, aussi », raconte Marie-Emmanuelle, qui a déjà dansé de manière semi-professionnelle, tout comme Florence-Olivia.

Les deux sœurs ont étudié la philosophie féministe pendant leur baccalauréat. Marie-Emmanuelle est aujourd’hui candidate au doctorat en droit et études légales à l’Université Concordia. Elle se penche sur la violence conjugale. Florence-Olivia est doctorante en droit à l’Université de Durham, en Angleterre, et spécialisée dans les questions d’égalité des sexes.

« Notre idée, c’était de démocratiser nos recherches dans de très courtes vidéos de façon à intéresser pas seulement des gens de notre milieu, mais aussi des personnes qui ont peur de se dire féministes ou qui ne croient pas à l’inégalité des sexes en 2022. »

– Florence-Olivia Genesse

Aujourd’hui, le compte The Sis est suivi par près de 346 000 internautes sur TikTok et 44 000 sur Instagram.

Marie-Emmanuelle et Florence-Olivia diffusent des capsules sur la misogynie, l’avortement, l’écart salarial entre les deux sexes… En octobre 2020, elles ont partagé le signe de détresse (replier les doigts sur le pouce dans la paume de la main) lancé par la Fondation canadienne des femmes. La vidéo est devenue virale et a été visionnée des dizaines de millions de fois. Deux Américaines qui avaient été enlevées ont d’ailleurs été secourues grâce à ce signe de la main.

Les sœurs reçoivent chaque jour des dizaines de messages, dont certains sont pénibles à lire. « C’est difficile, mais c’est aussi ce qui nous pousse à continuer parce qu’on constate qu’il existe encore des inégalités. Le jour où on arrêtera, ce sera le jour où il n’y en aura plus », dit Florence-Olivia.

Viviane Lalande affirme pour sa part qu’elle est épargnée, jusqu’à ce jour, par les commentaires d’internautes qui contestent la science. Mathieu Nadeau-Vallée, lui, est souvent la cible de complotistes. Au début, les menaces de mort, les vagues de haine et le doxing (diffusion de ses informations personnelles) étaient difficiles à encaisser. Aujourd’hui, il prend ces messages moins au sérieux, sauf les menaces, qu’il dénonce à la police.

« Des fois, je vais présenter des études révisées par les pairs et publiées dans des revues scientifiques et on va quand même me répondre : “oui, mais l’étude est financée par telle organisation”. Le hic, c’est que toute la science est financée. J’appelle donc ces personnes des “antisciences”. »

— Mathieu Nadeau-Vallée

« Et moi, je ne peux rien faire pour ces gens parce que mon outil, c’est la science. »

Qui est Viviane Lalande ?

• Née en France en 1986

• Titulaire d’un doctorat en génie mécanique spécialisé en biomécanique de Polytechnique Montréal

• Elle a gagné le concours Ma thèse en 180 secondes de l’Acfas en 2012 et le prix Jean-Perrin de la Société française de physique en 2021.

Qui est Mathieu Nadeau-Vallée ?

• Né à Greenfield Park en 1992

• Titulaire d’un baccalauréat en sciences biomédicales et d’un doctorat en pharmacologie, il est résident en anesthésie et doctorant en épidémiologie.

• Lauréat de plus de 30 récompenses parmi les plus convoitées du pays, dont une bourse Vanier, des Instituts de recherche en santé du Canada, et du prix Jim Glionna, du Temple de la renommée médicale canadienne.

Qui sont les sœurs Genesse ?

• Florence-Olivia et Marie-Emmanuelle Genesse sont nées à Bromont en 1995 et en 1998.

• Marie-Emmanuelle est candidate au doctorat en droit et études légales à l’Université Concordia, Florence-Olivia est doctorante en droit à l’Université de Durham, en Angleterre.

• Marie-Emmanuelle a reçu l’honneur Golden Key pour ses bons résultats scolaires, Florence-Olivia a obtenu le Golden Mitre, le plus grand honneur pour un diplômé à l’Université Bishop’s.

• Elles ont été conférencières à l’ONU Femmes, en 2020, dans le cadre des 16 Jours d’activisme de lutte contre la violence basée sur le genre à l’égard des femmes et des filles.

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