Traitements médicaux pour la COVID-19

Des patients étrangers laissent de lourdes factures impayées

Au moins une centaine de patients étrangers n’ont pas remboursé les soins qu’ils ont reçus contre la COVID-19. L’hospitalisation d’un Américain à elle seule a coûté près de 100 000 $, selon des documents obtenus à la suite d’une demande d’accès à l’information.

Il reste que Québec n’a pas un portrait clair du coût des traitements offerts aux patients non canadiens contre la COVID-19. Sur 23 CISSS et CIUSSS, 11 ont été en mesure de fournir des données à La Presse. L’autre moitié, ainsi que le CHUM et le CUSM, ne tient pas un registre des mauvaises créances liées à la pandémie. La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) n’a pas d’idée de la facture totale, non plus.

« L’information sur la provenance de la personne n’est pas une information obligatoire à fournir par les professionnels lors de la facturation des services rendus », a indiqué Sonia Marceau, responsable de l’accès aux documents à la RAMQ.

Dans les 11 régions ayant répondu à notre demande, 125 patients non canadiens n’ont pas payé leurs soins contre la COVID-19. Leur facture totale s’élève à 537 506 $. À l’hôpital Fleurimont, par exemple, un patient étranger s’est fait soigner pour une facture de 44 500 $. Un patient algérien a reçu des soins pour 35 592 $ dans Lanaudière. Un patient non canadien a obtenu des traitements pour 29 590 $ à l’hôpital Pierre-Boucher. La Montérégie-Centre et la Gaspésie n’ont quant à elles soigné aucun voyageur aux prises avec le virus.

Selon lInstitut canadien d’information sur la santé, le coût moyen d’une hospitalisation en lien avec la COVID-19 est estimé à 23 000 $, soit près de quatre fois celui d’un séjour à l’hôpital pour tous autres soins (6000 $). De janvier à novembre 2020, près de 14 000 personnes ont d’ailleurs séjourné à l’hôpital au Canada. Les statistiques de l’Institut excluent les données québécoises.

Une maladie longue à soigner

La facture non remboursée de 98 652 $ pour soigner un Américain dans un hôpital de Lanaudière, en septembre dernier, demeure la plus élevée. Un supplément de 200 % a d’ailleurs été facturé au patient étant donné qu’il n’était pas québécois. Ses frais s’élèvent donc à 297 205 $. Cet exemple, même sans le supplément, montre à quel point la COVID-19 coûte parfois cher en traitements médicaux.

La Dre Amélie Boisclair, intensiviste à l’hôpital Pierre-Le Gardeur, dans Lanaudière, souligne qu’une large équipe est nécessaire pour les « patients COVID ».

« Un patient COVID aux soins intensifs, ça lui prend une infirmière pour lui seul ou une infirmière pour deux patients. S’il est intubé, ça lui prend aussi un inhalothérapeute, un nutritionniste, un pharmacien, un physiothérapeute. »

— La Dre Amélie Boisclair, intensiviste à l’hôpital Pierre-Le Gardeur

« Tous les patients ont droit à ces soins, ajoute la Dre Boisclair. Les patients ‘‘verts’’ aussi. Mais la différence avec la COVID, c’est la lourdeur de la maladie. Les patients restent aux soins intensifs plusieurs jours, plusieurs semaines, parfois même plusieurs mois. »

Le DJoseph Dahine, intensiviste à la Cité-de-la-Santé de Laval, croit également que l’Américain à qui on a facturé des milliers de dollars est l’exemple d’un patient qui a séjourné plusieurs semaines aux soins intensifs.

« Dans certains cas, on va effectuer une trachéostomie chez certains patients COVID si ça fait longtemps que la personne est intubée. Cette opération peut faire augmenter les coûts. Les patients qui ont besoin de thérapie de remplacement rénale, ça peut aussi faire augmenter la facture », explique le DDahine. Mais ces exemples restent des exceptions, précise-t-il.

En mars 2020, le ministère de la Santé et des Services sociaux a annoncé que les tests de dépistage et les soins liés à la COVID-19 seraient offerts à toutes les personnes, même celles ne détenant pas de carte d’assurance maladie. Dans le cas des touristes, des travailleurs ou des étudiants étrangers, la RAMQ tente toutefois de réclamer les frais médicaux si le patient est couvert par son pays, par un programme fédéral ou par un contrat d’assurance. Sinon, ils sont couverts par l’assurance publique québécoise.

— Avec William Leclerc, La Presse

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