À la recherche d’une bague
Sunrise — Connor McDavid est arrivé au podium avec son air sévère, le même que d’habitude, vraiment, et il a rapidement fait cette confidence : « J’ai hâte que cette folie soit terminée. »
Cette folie, ça voulait dire cette foule médiatique massée devant lui, devant son podium, dans le cadre de cette journée des médias à Sunrise, passage obligé avant le début d’une finale de la Coupe Stanley.
Ça n’allait pas être son moment favori de la finale, et avec des questions un peu folles, souvent sans fil conducteur (« Quel est le côté le plus Hollywood chez toi ? »), on pouvait deviner que le capitaine des Oilers aurait préféré être ailleurs, par exemple dans un fauteuil de dentiste.
Mais il est resté là, droit comme un chêne, casquette vissée sur la tête, pendant une bonne vingtaine de minutes, à parler de cette finale qui s’en vient, du parcours effectué par son club avant d’arriver ici.
« On a compris qu’on avait une bonne équipe même quand les choses n’allaient pas bien pour nous en début de saison », a-t-il expliqué.
« Notre club s’est soudé, et ç’a été une bonne chose que d’avoir à faire face à cette adversité aussi rapidement dans la saison. On a prouvé qu’on pouvait surmonter tous les obstacles. »
— Connor McDavid
Connor McDavid a maintenant 27 ans. Il est avec les Oilers d’Edmonton depuis 2015, quand le club albertain l’a repêché avec le tout premier choix du repêchage cette année-là. En neuf saisons, il a seulement deux saisons de moins de 100 points au compteur, et encore, ça comprend une saison de pandémie écourtée, et ça comprend sa première saison, elle aussi écourtée, cette fois en raison d’une clavicule fracturée. Il vient de conclure 2023-2024 avec « seulement » 132 points, lui qui avait obtenu 153 points la saison précédente.
Mais tout le monde sait très bien ce qui lui manque : une bague de la Coupe Stanley.
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Le hockey est un sport d’équipe, c’est bien connu, et à cause de cette réalité, le capitaine n’est pas le seul membre des Oilers à qui il manque quelque chose. C’est la même réalité pour plusieurs autres, dont Leon Draisaitl, d’un an son aîné, qui collectionne lui aussi les saisons de plus de 100 points, mais pas les bagues. Du moins, pas encore.
Lui aussi commence à en entendre parler.
« On a grandi ensemble dans cette ligue, nous avions 18 ans, 19 ans, a expliqué Draisaitl vendredi à Sunrise. Nous étions des jeunes hommes qui arrivaient en même temps dans cette ligue. »
« Au fil des années, ce désir de gagner a pris de plus en plus d’importance à nos yeux. En sachant tout le travail qu’il fait, tout le travail qu’on fait, il y a eu beaucoup de déceptions au cours des dernières saisons. Mais nous sommes ici, et on se donne une chance de gagner. »
— Leon Draisaitl
Les Oilers de l’ère McDavid n’auront jamais été aussi près d’une première Coupe depuis 1990, jamais été aussi près d’une première Coupe de la part d’un club canadien depuis le CH de 1993. Si jamais tout ça se concrétise, ce sera fort probablement parce que le numéro 97 fera un peu de magie avec la rondelle.
« Il y a des choses qu’il peut faire à certains moments, et il n’y a qu’un seul joueur au monde qui peut faire ça », a admis Draisaitl.
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Au cours des prochains jours de cette finale qui s’amorce ce samedi soir en Floride, il sera beaucoup question de 1993, de cette très longue disette canadienne. Il sera question des Oilers, qui sont souvent, à tort pour être bien honnête, présentés comme « l’équipe du Canada ». Ce qui laisse croire qu’un pays en entier se range derrière une même équipe. Ce qui est, au mieux, illusoire.
Il sera aussi question de Connor McDavid et de son héritage. S’il ne gagne pas cette Coupe qui lui échappe depuis trop longtemps, pourra-t-il être considéré au même titre que les Wayne, Sidney et autres Mario, qui ont tous des bagues, eux ?
La question reste entière et le sera encore au moins quelques jours, dans cet édifice même où les patrons des Oilers ont prononcé son nom lors du repêchage de 2015.
« C’est drôle, comment ça fonctionne parfois, a-t-il ajouté. C’est la boucle qui est bouclée, presque neuf ans jour pour jour au même endroit. Quand j’y repense, ça passe tellement vite. J’ai l’impression que tout ça, c’était hier, et nous revoici à la même place, neuf ans plus tard. »
Il s’est levé et il est reparti, encore avec le même air sévère, qui ne disparaîtra peut-être qu’avec l’ajout d’une bague à son doigt.