Nouvelles zones inondables

Les partis de l’opposition craignent une « catastrophe »

« Désastre », « catastrophe » : les partis de l’opposition réclament que le gouvernement Legault dépose un plan d’adaptation et d’aide pour les riverains qui feront face aux changements climatiques avec sa nouvelle carte des zones inondables.

« Des gens pourraient perdre énormément d’argent sur la valeur de leur maison. Leur terrain ne vaudra plus rien. Des villages entiers pourraient se dévitaliser. C’est catastrophique », affirme la députée libérale Virginie Dufour.

Le député de Québec solidaire Étienne Grandmont est du même avis : « Ce n’est pas aux gens qui se sont installés en toute légalité dans ces endroits de payer seuls le coût de notre inaction collective [face aux changements climatiques]. C’est au gouvernement du Québec de prendre acte », laisse-t-il tomber.

Les deux élus demandent au gouvernement du Québec de rassurer les dizaines de milliers, voire les centaines de milliers de personnes qui résident dans les zones qui seront étiquetées comme inondables avec la refonte des règles qui sera annoncée prochainement par le ministre de l’Environnement, Benoit Charette.

La Presse rapportait mercredi matin l’histoire de Suzanne Leblanc, une femme en perte d’autonomie, contrainte d’utiliser une toilette sèche et de se laver à la débarbouillette, car elle ne peut adapter sa maison en raison des règles de zone inondable. Malgré le soutien de sa municipalité, le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs ne permet aucune exception.

Restrictions réglementaires, perte de valeur, difficulté à vendre sa résidence et à s’assurer. De nombreux propriétaires pourraient se retrouver pris avec leur maison en raison des nouvelles cartes de zones inondables en préparation, selon des élus municipaux et des experts.

Le nouveau règlement en préparation au ministère de l’Environnement ajoutera une troisième zone, celle de « 100-350 ans », selon un document obtenu par La Presse. Il y aura également un « relèvement généralisé des cotes de crues » pour prendre en compte la fréquence des crues des dernières années et les impacts des changements climatiques, notamment les risques de défaillance des efforts de retenue d’eau par Hydro-Québec dans le Nord.

Le REM en zone inondable ?

« Ça va être énorme », laisse tomber la libérale Virginie Dufour, qui connaît bien le dossier. Cette ancienne élue municipale à Laval a travaillé sur ce dossier en 2020, lorsque l’État québécois a donné un coup de barre après les inondations de 2017 et 2019.

Avec le 0-350 ans, elle estime qu’on va « élargir de trois à quatre fois les zones couvertes par le 0-100 ans ». Elle craint que les assureurs et les prêteurs hypothécaires se servent de cette information pour quitter ces marchés, comme Desjardins l’a fait dans le 0-20 ans. « Ça fait peur. Toutes ces propriétés seront à risque de ne plus être hypothéquées. C’est inquiétant. Ces gens vont-ils perdre leur maison ? Je n’entends pas le gouvernement sur cet enjeu. Est-il prêt à prendre la relève ? », demande-t-elle.

Elle croit même que « des quartiers entiers se construisent en ce moment » dans des zones qui seront jugées à risque. « Le REM de l’Ouest à Laval, il passe dans des zones comme ça. On est en train d’ouvrir, peut-être, une boîte de Pandore. Mais je ne vois pas où on pousse vers la résilience », dit-elle. Elle estime que l’État devrait promouvoir la construction de digues et de murets pour « protéger physiquement » les quartiers.

De son côté, le solidaire Étienne Grandmont demande que l’État québécois dénombre les résidences qui seront en zone inondable avec son nouvel exercice de cartographie. Pour l’instant, les ministères de la Sécurité publique et de l’Environnement l’ignorent.

Procès de Véronique Manceaux pour meurtre

Un témoin clé refuse de témoigner et pourrait être accusé d’outrage au tribunal

Un témoin clé de la Couronne a mis fin abruptement à son témoignage quasi hostile mercredi au procès de Véronique Manceaux, sa complice présumée dans le meurtre de Jimmy Méthot. Le juge lui a donné un ultime avertissement : s’il ne témoigne pas jeudi, il sera accusé d’outrage au tribunal.

« Honnêtement, j’en ai assez. C’est idiot. Accusez-moi d’outrage et qu’on en finisse. Je suis désolé », a soudainement lâché le jeune témoin devant le jury. Sa réponse était le point d’orgue d’un témoignage extrêmement difficile mercredi. Toute la journée, le jeune homme a prétendu n’avoir aucun souvenir de quoi que ce soit.

Pourtant, cet homme de 20 ans – qu’on ne peut identifier – n’est pas un témoin comme un autre au procès de Véronique Manceaux. Il a plaidé coupable du meurtre au premier degré de Jimmy Méthot et a été condamné à neuf ans de détention en « jeunesse », puisqu’il était adolescent au moment des faits.

Un témoin ne peut pas simplement décider de ne pas témoigner. C’est une « obligation », a rappelé au jury le juge Daniel Royer. Le magistrat a ainsi donné la nuit au témoin pour réfléchir. S’il refuse toujours de témoigner jeudi matin, il sera cité pour outrage au tribunal. « Ça pourrait avoir de graves conséquences pour sa vie », a indiqué le juge.

Dès le début de son témoignage, le jeune homme a donné le ton en prétendant qu’il ne se souvenait ni des circonstances du meurtre, ni d’avoir plaidé coupable, ni même… du nom de sa victime.

L’homme de 20 ans s’est contenté de réponses monosyllabiques pendant tout son témoignage. Peu importe les questions, il était réticent à répondre.

Du bout des lèvres, le jeune homme a concédé avoir plaidé coupable de meurtre au premier degré. Quelle était son implication ? Le jeune homme affirme ne pas s’en souvenir.

Pourtant, il a reconnu sous serment de nombreux faits dans cette affaire en plaidant coupable, a souligné l’avocate de la Couronne MJasmine Guillaume. « Je ne m’en souviens pas », a répliqué en anglais le témoin.

Ses problèmes de mémoire ne s’arrêtent pas là. Le jeune homme dit même ne pas savoir qui est l’accusée, Véronique Manceaux, ou qui était présent dans la maison le soir fatidique.

Selon la théorie de la Couronne, Jimmy Méthot a été assassiné par Véronique Manceaux le 6 septembre 2021 dans la résidence de celle-ci à Lachine. Cette nuit-là, l’adolescent (le témoin), une femme, l’accusée, Everett Roger Clayton et la victime étaient sur place.

Pendant la soirée, un conflit aurait éclaté entre Véronique Manceaux et Jimmy Méthot. L’accusée et le jeune témoin auraient alors battu la victime.

À un certain moment, Jimmy Méthot a réussi à prendre la fuite, mais l’adolescent l’a rattrapé. Les assaillants ont offert un « dernier repas » à la victime. Désespéré, Jimmy Méthot a tenté à nouveau de prendre la fuite. « Je ne veux pas crever comme ça », a-t-il supplié. C’est pendant sa fuite que Véronique Manceaux l’a poignardé ultimement, selon la Couronne.

Phase IV de la promenade Samuel-De Champlain

La CAQ prête à réduire l’autoroute Dufferin-Montmorency

Québec — Il y a 10 ans, la Coalition avenir Québec (CAQ) faisait campagne contre l’ajout d’une voie réservée sur une autoroute de la capitale, estimant qu’elle nuirait aux automobilistes. Voilà qu’aujourd’hui le parti de François Legault se dit favorable à la réduction d’une autoroute de Québec pour « redonner le fleuve aux citoyens ».

La transformation de l’autoroute Dufferin-Montmorency en boulevard urbain est essentielle pour réussir la phase IV de la promenade Samuel-De Champlain, a insisté mercredi le ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale. Jamais Jonatan Julien n’avait été aussi clair sur son intention de réduire cette autoroute située dans l’est de la capitale.

« Un boulevard urbain, c’est sine qua non », a lâché M. Julien en conférence de presse. « Si on ne pense pas à ça, arrêtons de travailler là-dessus, les amis. Pour moi, ça, c’est acquis. »

Le ministre et le maire de Québec, Bruno Marchand, ont participé mercredi au dévoilement des trois concepts primés à l’issue d’un concours d’idées international. Les firmes devaient imaginer la requalification d’une bande de terre entre le fleuve et l’autoroute sur 8,6 km, de la baie de Beauport jusqu’au parc de la Chute-Montmorency.

Ce projet, baptisé phase IV de la promenade Samuel-De Champlain, survient dans la foulée des trois premières phases, qui ont connu un succès monstre. Mais ces dernières ont été réalisées dans l’ouest de la capitale.

La phase IV doit se faire dans l’est de la ville, où une autoroute de six voies sous-utilisée bloque l’accès au fleuve. Dufferin-Montmorency a été construite en 1978 sur les battures de Beauport, un milieu naturel prisé des oiseaux et des poissons que le Canada considérait alors comme « un biotope particulièrement rare dans l’ensemble des écosystèmes de notre planète ». Le ministre péquiste Marcel Léger l’avait qualifiée de « bêtise du siècle ».

Le projet primé par le concours d’idées, celui des firmes québécoises Atelier L’Abri, Écoterritoire, Ghost et Le Picbois, prévoit le retrait de deux des six voies de l’autoroute. Retirer certaines des voies réservées aux voitures permettrait en effet de donner plus d’espace aux citoyens pour la construction d’une piste multifonctionnelle ou encore pour rendre au secteur sa biodiversité.

« Je l’emprunte assez régulièrement et il y a à notre avis une capacité excédentaire, a dit Jonatan Julien à propos de l’autoroute. Donc il faudra trouver l’équilibre. On souhaite une mobilité active, mais pas au détriment d’autres mobilités. Je pense que le boulevard se prête à cette transformation. »

La voie autoroutière a une capacité d’au moins 90 000 véhicules par jour. Mais selon les données les plus récentes, les tronçons de l’autoroute devant les battures de Beauport voient passer 30 000 véhicules par jour dans les secteurs les plus occupés, et à peine 18 000 par endroits.

M. Julien a indiqué que le ministère des Transports devrait analyser ce qui était réaliste comme scénario. « Je vois l’appui de la communauté, a-t-il dit. Mon premier ministre et la ministre des Transports sont derrière le projet avec moi. »

Le gouvernement reste vague quant à l’échéancier. La Commission de la capitale-nationale du Québec, qui porte le projet, devra s’asseoir « avec les différents partenaires », dont le ministère des Transports. Cinq millions de dollars ont été prévus au dernier Plan québécois des infrastructures pour parfaire la conceptualisation.

Place Émilie-Gamelin

Un promoteur pourra démolir un immeuble malgré le refus de partir d’une locataire

Le promoteur Mondev pourra finalement raser l’immeuble faisant face à la place Émilie-Gamelin pour y construire une tour résidentielle de 16 étages, et ce, malgré le fait que l’ultime locataire des lieux refuse de partir. Montréal vient en effet de délivrer un permis de démolition.

Au cabinet de la mairesse Valérie Plante, on indique que Mondev « a démontré que plusieurs options de relocalisation ont été offertes à la locataire » et que « conséquemment, le permis a été délivré ».

« Nous souhaitons toujours qu’il y ait entente entre la locataire et le promoteur et que le projet puisse aller de l’avant en redynamisant le secteur », maintient cependant l’attachée de presse Catherine Cadotte.

Mondev veut construire une tour résidentielle de 16 étages et 176 logements à l’angle des rues Saint-Hubert et Sainte-Catherine, devant la place Émilie-Gamelin. Les immeubles qui s’y trouvent, dont celui de l’ancien restaurant Da Giovanni, sont promis à la démolition pour faire place à un projet immobilier. Le secteur fait les manchettes depuis des mois en raison de la crise sociale qui y sévit.

Depuis des mois, toutefois, le promoteur se bute à un problème de taille : une locataire, Carla White, qui habite un modeste appartement dans un immeuble promis à la démolition, refuse obstinément de le quitter. Elle a déjà refusé un chèque de 20 000 $ ainsi qu’un plus bel appartement à seulement 400 $ par mois, selon l’entreprise, qui dit être à bout de ressources.

« Elle ne veut rien savoir. Ça fait des années qu’on lui parle. Elle veut un penthouse avec une vue sur le centre-ville, une vue vers l’ouest. Une grande terrasse. Ce sont des demandes selon nous complètement déraisonnables », avait affirmé le codirigeant de Mondev, Michael Owen, au sujet de la locataire, en juin dernier. Il n’a pas été possible de joindre M. Owen à ce sujet, mercredi soir.

Trois mois pour déménager

MManuel Johnson, l’avocat qui représente les intérêts de Carla White, faisait quant à lui valoir depuis le début que sa cliente voulait simplement obtenir une stabilité résidentielle à long terme et que la position de sa cliente était dépeinte de façon exagérée par Mondev.

« Elle est toujours intéressée à avoir un logement, avait fait valoir MJohnson. Maintenant, l’offre de 20 000 $, c’est non. Ce n’est pas suffisant pour lui donner une stabilité de logement pour plus d’un an ou un an et demi. Le 20 000 $, elle va le mettre dans les poches d’un autre propriétaire. Les logements disponibles maintenant à Montréal, c’est 1000 $, 1500 $. »

Selon le quotidien Le Devoir, qui a d’abord rapporté la nouvelle mercredi, le permis de démolition a officiellement été délivré le 27 mars dernier. Mme White a ensuite reçu l’ordre d’un huissier de quitter son logement d’ici le 30 juin prochain.

La locataire, qui devrait toucher l’équivalent de trois mois de loyer ainsi qu’un dédommagement pour rembourser les frais liés à son futur déménagement, entend toutefois faire valoir ses arguments lors de la prochaine séance du conseil d’arrondissement de Ville-Marie, prévue le 9 avril. Son avocat aurait aussi l’intention de contester la décision, même si la nature des recours potentiels demeure inconnue.

En principe, la démolition du bâtiment devrait s’amorcer au tournant de l’automne prochain. Le nouvel immeuble devrait ensuite mettre trois ans à sortir de terre, une fois le chantier lancé.

— Avec Philippe Teisceira-Lessard, La Presse

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