Personnalités de la semaine

Olivier Girouard et Jonathan Villeneuve

L’installation interactive Loop, constituée de treize roues géantes et animées installées à la place des Festivals, au Quartier des spectacles, connaît un succès retentissant et fait parler d’elle un peu partout. Olivier Girouard et Jonathan Villeneuve, les artistes à l’origine de ce projet, sont nos personnalités de la semaine.

Olivier Girouard est musicien et compositeur. Il a étudié en chant, en guitare classique et en composition électroacoustique. Il est diplômé du Conservatoire de musique de Montréal et de l’Université de Montréal et dirige l’organisme sans but lucratif Ekumen, qui réalise des productions diverses, surtout dans le domaine sonore. Apprenant l’existence de l’appel de projets de Luminothérapie du Quartier des spectacles, il a approché Jonathan Villeneuve pour se lancer dans cette aventure. Jonathan Villeneuve est artiste visuel spécialisé en arts numériques et en art public. Il est diplômé de l’UQAM et de Concordia.

« Je me qualifie d’artiste “patenteux”, dit ce dernier. J’invente des machines qui n’existent pas, le plus souvent en essayant de mêler des éléments qui sont, a priori, incompatibles. Au départ, le nom que l’on avait choisi pour ces machines était celui de chimère, ce monstre mythologique à trois têtes, mais nous avons finalement opté pour Loop, plus simple et plus facile à utiliser. »

Les treize roues géantes, aussi appelées zootropes, sont faites d’un millier de pièces chacune. En tout, les artistes ont vissé eux-mêmes quelque 22 000 vis. Ces machines ludiques contiennent, entre autres, une boîte à musique actionnée mécaniquement, faite d’un xylophone, et un thaumatrope, jouet optique d’une autre époque. Le principe permettant d’actionner la musique et les images inspirées de contes pour enfants qui tournent en boucle dans chaque roue est un peu inspiré des anciennes draisines, véhicules utilisés pour circuler sur les chemins de fer.

« Ce sont toutes des technologies archaïques, et le défi était de les intégrer au sein d’un objet au design futuriste, une machine complète et autonome. Quand on regarde la machine, ça semble très simple, mais il y a tout un mécanisme à l’intérieur. Nous n’avions pas tellement d’exemples sur lesquels nous appuyer. Avec la collaboration de différentes personnes, on a vraiment inventé un système jamais vu, qui reste caché, mais qui a demandé beaucoup de travail. Nous avons notamment eu l’aide de Jérôme Roy, qui a déjà travaillé dans le développement de vélos de performance, qui a travaillé sur le mécanisme. »

Huit mois

Malgré sa complexité, le projet a été mené à bien en un temps record : entre le moment où les artistes ont reçu le feu vert du Quartier des spectacles et l’inauguration de Loop, en décembre, à peine huit mois se sont écoulés. Pour y arriver, ils ont fait appel à plusieurs collaborateurs et sous-traitants, entre autres Thomas Ouellet Fredericks, Ottoblix, Generique Design, Softbox, Extrudex-Aluminium et Custom-Métal, ce qui a permis de fournir du travail à une cinquantaine de personnes pendant la conception, le design et la fabrication des zootropes. Ils ont également procédé à des tests à bord de camions réfrigérés pour s’assurer que les zootropes pourraient fonctionner en hiver.

« Ç’a été pour nous un défi, en tant qu’artistes, de convaincre des gens qui ont l’habitude de travailler sur des projets industriels d’embarquer dans un projet comme celui-ci, avec des objets en quantités limitées, et de suivre le rythme, mais ceux qu’on a trouvés étaient vraiment motivés et soucieux de bien faire », dit Jonathan Villeneuve. 

« L’une des choses que j’aime le plus dans les projets d’art public, c’est que l’on est en contact avec une foule de gens de différents métiers et qui n’ont rien à voir avec l’art. Ils sont curieux du domaine et nous posent une foule de questions sur notre travail. Ils ont une soif de comprendre la réalité d’un artiste. »

— Jonathan Villeneuve, artiste visuel spécialisé en arts numériques et en art public

Les zootropes de Loop, qui sont en place depuis le 8 décembre et le resteront jusqu’au 29 janvier, ont attiré des dizaines de milliers de promeneurs et de touristes de passage, heureux de retomber en enfance. Pendant tout ce temps, les deux artistes assurent l’entretien de leurs machines presque au quotidien.

Comme d’autres œuvres d’art public du Quartier des spectacles qui sont actuellement en tournée en Europe, les deux artistes espèrent que Loop pourra voyager.

« Avec l’art public, ça prend des gens qui sont prêts à prendre des risques, et le Quartier des spectacles nous a fait confiance en nous donnant un budget à nous, une petite compagnie. Il en faut, pour que les artistes puissent réaliser des projets comme celui-là », dit Olivier Girouard.

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